Ca y est c’est parti pour les travaux de semi-piétonnisation du Vieux-Port ! Cela augure, comme pour tous travaux en hypercentre, et peut-être plus encore parce qu’il s’agit de Marseille, une belle pagaille. Marseille et ses foutues bagnoles… 50 ans d’amour fou, merci Monsieur Defferre, mais il est plus que temps de revoir ses modèles urbanistiques.
Il est vrai que la fée de l’urbanisme, si fée il y a, a complètement déserté la cité et ce, depuis belle lurette !
L’urbanisme à Marseille, a tout au long du XXe siècle et aujourd’hui encore, été appréhendé comme un mal nécessaire, une chose bizarre (est-ce une science ? Que nenni ! Une discipline qui s’apprendrait et serait l’apanage de gens qualifiés ? Non ! ), une sorte de bricolage mêlant petits arrangements entre amis, placement de copains et fils de, poudre aux yeux, gabegies, improvisations… Au final des projets, encore des projets et toujours des projets qui restent au fond des tiroirs, qui sont commencés puis laissés en suspens, repoussés sine die, (qu’ont pu réaliser ces plus célèbres urbanistes que furent Castel, Greber, Beaudouin, où en est la L2… vous savez ce contournement planifié depuis les années 1930 ? … aux plus oubliés : qui se souvient Du Gnomon de la fin des années 90, de ses levées de fonds, des souscriptions… où est passé l’argent ??) C’est aussi un petit lot de projets conçus en dépit du bon sens, sans concertations, sans véritables réflexions...
Marseille est une ville de projet, mais ne doit pas s’en contenter ! Elle a les moyens d’exploser, d’être une ville enviée, respectée, montrée en exemple ! Les gens de qualité ne manquent pas ici, mais conservatisme oblige, manque d’ambition et surtout auto-dévalorisation et complexes d’infériorité insurmontables, font que les talents ont bien du mal à se révéler !
Marseille serait encore une ville plébéienne, une ville de pauvres (ce qu’elle demeure en certains points), une ville d’acculturés, d’incultes et de sous-instruits, d’où rien de bon ne pourrait émerger in situ sans l’aide des pointures (chères à MM Defferre et Vigouroux, puis Gaudin) parisiennes et maintenant internationales.
Marseille compte des Marseillais de talents, compétents, innovants, créateurs, pleins d’idées et qui ont l’avantage de connaître la ville, cette ville pleine de spécificités que l’estranger a tant de mal à appréhender et comprendre ! Ils savent mieux que quiconque ce dont elle a besoin, ce qui peut fédérer, être le plus utile… La façon dont on se charge de MP2013 est sur ce point édifiant et navrant pour toutes les petites structures culturelles locales associatives qui créent la ville au quotidien, s’investissent corps et âmes souvent sans un sou et sans reconnaissance ! Ne pas les associer et faire appel à des étrangers, donc pire que des estrangers ( !), des artistes de pays anglo-saxons me paraît plus que malvenu, méprisant et même ignoble… on parle de culture marseillaise, provençale, méditerranéenne, bon sang ! Déjà qu’elle est sous la coupe de Parisiens !
Mais revenons-en à notre Vieux-Port, car de digression en digression mon post va finir par faire 5 pages et lasser tout le monde.
Savez-vous que 10 % du Lacydon a été fouillé avec d’infimes précautions vu les trésors grecs et romains convoités : on remue 3 m de vase au godet géant d’une pelleteuse afin de remonter des vestiges archéologiques que le godet aura précieusement respecté, malin qu’il est !
Depuis le chantier de la Bourse l’archéologie préventive a beaucoup évolué, elle est devenue obligatoire et le préalable à tout chantier. Les derniers chantiers à Marseille ont été, je pense à Malaval notamment, remarquablement fouillés, et de façon exhaustive… mais pour quoi faire si ce n’est faire progresser la connaissance : rappelons que les archéologues y ont fait la découverte exceptionnelle d’une nécropole et basilique funéraire paléochrétienne du Ve siècle contenant 230 sépultures, une cinquantaine de sarcophages et que la tombe vénérée (dédiée à Saint-Etienne ? ) est demeurée intacte. Bien sûr, rien n’a pu être conservé in situ, malgré l’opiniâtreté du Comité du Vieux Marseille, et rien ne sera non plus installé, comme le souhaitait ardemment Manuel Moliner, archéologue de la Ville, dans les galeries situées sous la cathédrale, emplacement idéal en tous points, dans le futur quartier culturel, patrimonial et touristique… mais c’est tellement moins fructueux qu’une boutique franchisée pour touristes et bobos !
Malgré cette avancée et la meilleure prise en compte des vestiges antiques, je suis tombé de haut en apprenant que les fouilles sous-marines, pratiquées à la pelleteuse donc (Au secours Luc Long ! le Lacydon méritait votre attention, comme le Rhône), le furent de façon assez hasardeuse, puisqu’aucun sondage n’a été effectué (de simples carottages), afin de préserver l’emplacement le plus opportun et prometteur ! Retour en arrière et fouille-alibi, manière de se donner bonne conscience, tout en évitant d’avoir sur les bras des découvertes encombrantes, dont on ne sait que faire, surtout s’il s’agit encore d’une de ces foutues barcasses (Oh non encore une embarcation de pêche cousue, datant du VIe siècle av. J.-C., pitié tout mais pas ça !) ! Par contre quelle tristesse de remonter tant de détritus bouteilles, vélo, pneus, chaussures…
Et la piétonisation dans tout cela ? Un consensus inédit et à louer (enfin !!) mais empoignades en coulisse, une excellente idée, du flou, beaucoup de flou, une vidéo de présentation lamentable, pitoyable avec un style à pleurer mêlant lenteur exagérée du travelling avec brusque accélération style ex-série TV branchée aujourd’hui dépassée, discours d’une totale vacuité présentation réelle du programme insignifiante : en une minute tout est dit, donc presque rien !
Quoi d’autre ? Du plus, du moins, pour les piétons ou les voitures, 2 voies au lieu de 9 (sans L2 ni bd du Littoral ! Les us et mentalités seront obligés de changer, tant mieux mais dur dur !) une grande place (ah enfin ! ), une ombrière signée Norman Foster…
Et un discours politique salvateur plein de RE RE RE : renaissance, reconquête, reconfiguration, redynamisation, réaménagement, repositionnement, recomposition, requalification, réhabilitation, revitalisation, réorganisation, rénovation… Michel Vauzelle a même le culot de parler de RECONCILIER Marseille avec son port !! Comme si les Marseillais, dans leur ensemble, détestaient le Vieux-Port ! Le VP était-il vraiment mourant ?
Mais ce programme sensé nous permettre de mieux respirer, de revivre même !, est-il respectueux de tous, responsable, réfléchi, rassembleur et sera-t-il sans RETARD ?
Et où va-t-on mettre les cars de touristes, car curieusement personne n’y a songé, je n’ai d’ailleurs eu que des retours du style il ya aura quelques places derrière la Bourse ! Pour rappel 1 million de croisiéristes à l’autre bout de la ville au Môle Léon Gourret dont Marseille aimerait (et il le faudrait absolument) capter l’attention de quelques uns. Comme il n’y a pas d’autre alternative que les cars de tourisme spécialement affrétés, que faire lorsque 4000 passagers arrivent d’un même bateau en escale : continuer à les envoyer à Aix, Avignon, aux Baux, voire à Paris ? Sommes-nous condamné à se priver le leur fort pouvoir d’achat, d’une probable agréable découverte de cette ville tant vilipendée, qu’ils pourront ensuite promouvoir à leur retour à leur entourage et même être tenté de venir vraiment visiter, y séjourner ? A condition, bien sûr, que les sabordeurs-saboteurs habituels ne soient pas à pied d’œuvre !